Intitulé d’abord La Poubelle du labo, puis L’Enfer du cinéma, ce film, projeté pour la première fois en septembre 1968 à la Cinémathèque française, est l’homologue cinématographique des mots dans un sac de Tzara, ou mieux, une œuvre ressortissant de l’eshautomatisme isouien filmique. Il a été réalisé, en effet, à partir d’éléments de pellicule pêchés dans les poubelles d’un laboratoire de films, qui ont été joints bout à bout dans l’ordre même de récupération. Le son est celui qui se trouvait originellement sur la pellicule, ou il provient du passage de la partie d’image correspondant à la bande sonore devant le lecteur-son optique de l’appareil de projection. Ce son se trouve ainsi lui-même englobé dans la phase polyautomatique. De plus, le décalage habituel qui se trouve sur la copie standard entre l’image et le son (décalage nécessaire pour la projection synchrone) n’ayant pas été respecté ici, la bande sonore est ainsi, pour la première fois, semble-t-il, au cinéma, discrépante d’une manière spontanée. Si le résultat peut apparaître à certains spectateurs un peu éprouvant, je crois qu’il restera néanmoins dans l’Histoire du Film pour l’audace extrême qu’il représente et le style esthétique qu’il illustre, peut-être solitaire aujourd’hui.
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