Dominik Lange exécute, ici, une sonate visuelle épurée où les éléments qui composent son univers habituel (murs, friches, squares, voitures…) sont saisis, en eux-mêmes, par une caméra plus capteuse que démiurgique ou transformatrice d'énergie et de visions comme ce sera le cas dans certains de ses films ultérieurs. Le processus filmique mis en place n'en est pas moins rigoureux : “Transport carcéral urbain”, filmé d'un véhicule en marche, se compose d'une série de travellings latéraux — allant toujours de l'avant — de droite à gauche, qui saisissent, dans un mouvement plus ou moins accéléré (mais sans surimpressions ni montage caméra), des arrières plans de murs, de parcs, de terrains vagues, de gares, de quais. Les compositions mouvantes proposées à notre regard comportent plusieurs degrés de profondeurs de champs, et diverses vitesses décroissant avec le recul, qui se diffractent par la présence systématique de grillages et de barreaux divers entre l'objectif et les motifs les plus éloignés. Le cinéaste décline son art poétique avec une sobriété quasi-documentaire : le minéral, le végétal et le métal s'entremêlent en compositions abstraites ou géométriques, dans leur état de dégradation même capté par la caméra. Raphaël Bassan
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