“Une jeune fille Aurélia Steiner écrit à un destinataire multiple et changeant : un amant marin, le spectateur, ses parents morts, ses ancêtres juifs exterminés dans les camps. Elle dit le désir, la mort. Le rectangle blanc de l’écran devient le rectangle blanc de la cour de rassemblement d’un camp d’extermination. Le film sans musique sur l ’irracontable alterne entre autre des images de paysage ( le ciel, la mer, les arbres) et le texte manuscrit de l’auteur.” Bernard Sarrut “Il n’y a pas de blanc dans les films en couleurs. La véritable blancheur, celle de la neige, celle de l’écume, celle des fleurs blanches les nuits de lune, elle n’est rendue que par le noir et blanc. La neige dans Aurélia Steiner elle est le long des quais de Vancouver dans l’écume de la mer, je l’ai reconnue dans le film. Quand j’ai écrit Aurélia Steiner Vancouver, je n’étais pas sûre de pouvoir le tourner après. Je l’ai écrit dans le bonheur de ne pas le tourner après. Si on ne m’avait pas donné les cinq millions pour le tourner j’aurais fait un film noir, une bande optique noire. Elle est dans les camps de concentration Aurélia Steiner, c’est là qu’elle vit. Les camps de concentration allemands, Auschwitz, Birkenau étaient des lieux continentaux, étouffants, très froids en hiver, brûlants en été, très loin à l’intérieur de l’Europe, très loin de la mer. C’est là qu’elle se transporte pour écrire son histoire, c’est à dire celle des juifs de tous les temps. Le film d’Aurélia Steiner Vancouver était impossible. Il a été fait. Le film est admirable parce qu’il n’essaie pas de corriger l’impossibilité. Il accompagne cette impossibilité, il marche à son côté. Il faut laisser venir l’extérieur à vous. Par exemple, je n’ai pas d’idées sur l’image qui doit être sous le jeune pendu d’Auschwitz. C’est en passant devant la rangée droite des peupliers de la Mauldre que je me dis : ce sera ça.” Marguerite Duras
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